1 - Introduction.

2 - Les deux femmes

3 - La maison.

4 - L'enfant.

5 - La contestation.

a) Exposition de la plainte.

b) Le jugement de Salomon.

c) La réaction des deux prostituées.

6 - La sagesse de Salomon.

1 - Introduction.


Il y a dans le premier livre des rois une histoire très connue qui m'a toujours choquée, c'est celle ou Salomon prononce son premier jugement juste après que Dieu lui ait donné la sagesse qui fera de lui un roi de légende. Le texte nous présente les choses comme suit :

  • 1 Rois 3.16-28 : Alors deux femmes prostituées vinrent chez le roi, et se présentèrent devant lui. L'une des femmes dit: Pardon! Mon seigneur, moi et cette femme nous demeurions dans la même maison, et je suis accouché près d'elle dans la maison. Trois jours après, cette femme est aussi accouché. Nous habitions ensemble, aucun étranger n'était avec nous dans la maison, il n'y avait que nous deux. Le fils de cette femme est mort pendant la nuit, parce qu'elle s'était couchée sur lui. Elle s'est levée au milieu de la nuit, elle a pris mon fils à mes côtés tandis que ta servante dormait, et elle l'a couché dans son sein; et son fils qui était mort, elle l'a couché dans mon sein. Le matin, je me suis levée pour allaiter mon fils; et voici, il était mort. Je l'ai regardé attentivement le matin; et voici, ce n'était pas mon fils que j'avais enfanté. L'autre femme dit: Au contraire! c'est mon fils qui est vivant, et c'est ton fils qui est mort. Mais la première répliqua: Nullement! C'est ton fils qui est mort, et c'est mon fils qui est vivant. C'est ainsi qu'elles parlèrent devant le roi. Le roi dit: L'une dit: C'est mon fils qui est vivant, et c'est ton fils qui est mort; et l'autre dit: Nullement! C'est ton fils qui est mort, et c'est mon fils qui est vivant. Puis il ajouta: Apportez-moi une épée. On apporta une épée devant le roi. Et le roi dit: Coupez en deux l'enfant qui vit, et donnez-en la moitié à l'une et la moitié à l'autre. Alors la femme dont le fils était vivant sentit ses entrailles s'émouvoir pour son fils, et elle dit au roi: Ah! Mon seigneur, donnez-lui l'enfant qui vit, et ne le faites point mourir. Mais l'autre dit: Il ne sera ni à moi ni à toi; coupez-le! Et le roi, prenant la parole, dit: Donnez à la première l'enfant qui vit, et ne le faites point mourir. C'est elle qui est sa mère. Tout Israël apprit le jugement que le roi avait prononcé. Et l'on craignit le roi, car on vit que la sagesse de Dieu était en lui pour le diriger dans ses jugements.
Ce qui m'a toujours choqué n'a rien à voir avec le  jugement lui-même, mais avec le tout premier verset : Alors deux femmes prostituées vinrent chez le roi. Salomon, qui vient de recevoir une sagesse au-delà de ce que l'on peut imaginer, se fait l'arbitre entre deux prostituées, alors que la loi, qu'une sagesse élémentaire commanderait de suivre, dit explicitement : Il n'y aura aucune prostituée parmi les filles d'Israël, et il n'y aura aucun prostitué parmi les fils d'Israël (Deutéronome 23.17). Il m'a toujours semblé évident que ce passage devait cacher quelque chose. Il devait nécessairement y avoir une signification que je ne percevais pas. En voici une explication possible.

2 - Les deux femmes.


  • 1 Rois 3.16-17 : Alors deux femmes prostituées vinrent chez le roi, et se présentèrent devant lui. L'une des femmes dit: Pardon! mon seigneur, moi et cette femme nous demeurions dans la même maison, et je suis accouché près d'elle dans la maison.

Ces deux femmes représentent plusieurs choses. Il est vrai qu'il y a plusieurs niveaux de compréhension dans ce jugement. Ces deux femmes sont deux versions du peuple de Dieu. La version d'avant la venue de Jésus, et celle d'après. J'ai volontairement choisi de ne pas utiliser les termes de loi et de grâce parce que, dans les deux cas, il s'agit de ceux qui ne sont pas fidèles à ce que Dieu demandait à ces deux époques. Dans les deux cas il s'agit de prostituées. La notion de prostitution doit cependant être prise avec des pincettes. Pour ces deux femmes, qui comme je le disais, représentent deux versions du peuple de Dieu, cela définit ce qu'elles sont, pas ce qu'elles vont devenir. Nous savons qu'au moment où elles ont reçu leurs enfants respectifs, elles étaient prostituées.

Ces deux femmes représentent également deux personnages précis de la Parole de Dieu, mais je reviendrai là-dessus plus tard.

3 - La maison.


  • 1 Rois 3.18 : Trois jours après, cette femme est aussi accouchée. Nous habitions ensemble, aucun étranger n'était avec nous dans la maison, il n'y avait que nous deux.

La maison est donc la maison de Dieu, une fois de plus sans distinction de période historique. Simplement la maison que Dieu crée, celle qu'imaginait Israël et que l'Église de Christ devrait représenter. Il ne faut cependant pas les différencier. Ce n'est qu'une seule maison. Bien des croyants pensent qu'Israël se convertira à la fin des temps, bien que cela soit vrai, ses descendants charnels ont accès au salut de la même manière que les non juifs. Le sacrifice de Jésus n'est pas 'Jésus qui se tourne vers les nations', mais 'Jésus qui s'ouvre à tous, indifféremment'. D'où le fait qu'il n'y ait qu'une seule maison, et qu'aucun étranger ne se trouvait avec les deux prostituées.

4 - L'enfant.


L'enfant est plus difficile à comprendre.

  • 1 Rois 3.17b-18 : je suis accouché près d'elle dans la maison. Trois jours après, cette femme est aussi accouchée.

La difficulté de compréhension vient de ce que la scène relatée dans le livre des Rois nous fait cas de deux enfants, alors que dans la signification, il n'y en a qu'un. C'est pour cela que l'un des deux devait mourir. Cet enfant représente Jésus avant et après son sacrifice, c'est de là que vient le fait que le deuxième enfant soit né 3 jours après le premier. Ce sont les trois jours pendant lesquels Jésus passe de charnel à spirituel, les trois jours où la loi s'accomplit dans la grâce. Ces deux enfants représentent également une descendance forcée par la loi, et une descendance accomplie par la grâce. Une fois de plus, je vais revenir là-dessus sous peu.

5 - La contestation.


Il faut différencier trois moments particuliers dans la scène qui se déroule dans le palais de Salomon.


a) Exposition de la plainte.

  • 1 Rois 3.16-22 : Alors deux femmes prostituées vinrent chez le roi, et se présentèrent devant lui. L'une des femmes dit: Pardon! Mon seigneur, moi et cette femme nous demeurions dans la même maison, et je suis accouché près d'elle dans la maison. Trois jours après, cette femme est aussi accouchée. Nous habitions ensemble, aucun étranger n'était avec nous dans la maison, il n'y avait que nous deux. Le fils de cette femme est mort pendant la nuit, parce qu'elle s'était couchée sur lui. Elle s'est levée au milieu de la nuit, elle a pris mon fils à mes côtés tandis que ta servante dormait, et elle l'a couché dans son sein; et son fils qui était mort, elle l'a couché dans mon sein. Le matin, je me suis levée pour allaiter mon fils; et voici, il était mort. Je l'ai regardé attentivement le matin; et voici, ce n'était pas mon fils que j'avais enfanté. L'autre femme dit: Au contraire! c'est mon fils qui est vivant, et c'est ton fils qui est mort. Mais la première répliqua: Nullement! C'est ton fils qui est mort, et c'est mon fils qui est vivant. C'est ainsi qu'elles parlèrent devant le roi.

La situation est la suivante :

Nous avons deux prostituées qui se présentent devant le roi Salomon au sujet de la mort d'un enfant et du vol d'un autre. La situation présentée est la suivante :

- Prostituée 1 accouche,

- 3 jours plus tard, prostituée 2 accouche,

- Dans la nuit, le nourrisson de prostituée 2 meurt,

- Prostituée 2 remplace les deux bébés et s'accapare donc le bébé de prostituée 1,

- Cela se termine par un crêpage de chignons.

Par défaut, les lecteurs ont tendance à croire que la prostituée 1 dit la vérité et que la prostituée 2 ment. Il faut cependant prendre en compte que l'être humain a une tendance naturelle à se ranger du côté de celui qui se présente comme une victime, mais qu'ici, de toute évidence, une des deux prostituées ment et que rien ne nous dit de laquelle il s'agit.

Gardons à l'esprit que Salomon n'est pas en présence de deux femmes vertueuses qui auraient un différent. Placer sa confiance dans les dires de l'une des deux serait une énorme erreur, et, pour le coup, un manque de sagesse. Il pourrait parfaitement ne jamais y avoir eu d'échange d'enfant, et la prostituée 1 tenterait simplement, dans sa présentation au roi Salomon, de s'accaparer l'enfant de la prostituée 2.


b) Le jugement de Salomon.

  • 1 Rois 3.23-25 : Le roi dit: L'une dit: C'est mon fils qui est vivant, et c'est ton fils qui est mort; et l'autre dit: Nullement! C'est ton fils qui est mort, et c'est mon fils qui est vivant. Puis il ajouta: Apportez-moi une épée. On apporta une épée devant le roi. Et le roi dit: Coupez en deux l'enfant qui vit, et donnez-en la moitié à l'une et la moitié à l'autre.

Signe que le roi ne peut baser sa décision sur les paroles des deux femmes, il déplace le conflit sur un autre plan. Il cesse de parler à leurs intelligences, et s'adresse à leur cœur. La sagesse du jugement de Salomon ne se retrouve pas dans les termes du jugement, mais dans les raisons qui l'ont fait le prononcer. Il a établi par son jugement que l'amour est au-dessus de toute chose. Pourtant sa décision n'est ni plus ni moins, dans les apparences, que le meurtre d'un enfant. Dans la réalité, cependant, ce qui constitue la force de ce jugement, c'est que Salomon avait rejeté tout ancrage dans le charnel. Sa compréhension de l'amour était telle à cet instant qu'il savait que l'amour triompherait de la mort. Il savait, à cet instant, que, tout comme Abraham acceptant la mort d'Isaac ne le perdrait pas, l'enfant qui était devant lui trouverait la vie à travers la 'mort'.


c) La réaction des deux prostituées.

  • 1 Rois 3.26-27 : Alors la femme dont le fils était vivant sentit ses entrailles s'émouvoir pour son fils, et elle dit au roi: Ah! Mon seigneur, donnez-lui l'enfant qui vit, et ne le faites point mourir. Mais l'autre dit: Il ne sera ni à moi ni à toi; coupez-le! Et le roi, prenant la parole, dit: Donnez à la première l'enfant qui vit, et ne le faites point mourir. C'est elle qui est sa mère.

Nous avions donc deux prostituées se querellant et le roi Salomon qui intervient. Il fait taire le pugilat verbal et demande à ce que chaque femme reçoive la moitié de l'enfant. C'est alors que l'une d'entre elles intervient, celle que le roi appelle 'la première'. La réalité est que nous ne savons pas de laquelle il parle. Tout ce que nous savons c'est qu'il fait référence à la première qui a réagi à sa sentence, mais nous ne savons pas de laquelle des deux du début du passage il parle.

Dans son jugement, Salomon n'établit pas la lignée génétique de l'enfant, mais sa lignée spirituelle. La lignée physique a disparu dans le mensonge, et il n'est plus possible de la retrouver. Ici, Salomon introduit une nouvelle descendance, celle qui est fondée sur l'amour. Les parallèles sont nombreux, et sur bien des niveaux, je parlais déjà d'Abraham, mais c'est également le cas de Jésus, dont la lignée génétique a pris fin pour en instaurer une autre, spirituelle, et basée sur l'amour, mais c'est également l'image de Jean, le disciple que Jésus aimait, et de Marie, la mère charnelle de Jésus, qui devient la mère de Jean par l'Esprit.

Cet enfant, c'est Jésus, qui nous disait : Qui est ma mère, et qui sont mes frères? Puis, étendant la main sur ses disciples, il dit: Voici ma mère et mes frères. Car, quiconque fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère, et ma sœur, et ma mère (Matthieu 12.48b-50). Cette femme, prostituée de son état, a mené en son temps, et certainement sans s'en rendre compte, la loi à la perfection. Elle, pécheresse parmi les pécheurs, a aimé jusqu'à accepter la perte de ses propres revendications pour le bien d'autrui. Le jugement de Salomon ne nous dit pas réellement qu'elle était sa mère, mais qu'elle l'est devenue à l'instant même où son amour pour lui a dépassé son intérêt pour elle-même.

L'autre femme de son côté est très exactement l'image de l'esprit de Jézabel, qui a pour but premier, non pas de posséder un ministère, mais d'en déposséder son propriétaire original. Elle ne l'exerce ensuite que pour éviter qu'il soit récupéré. Avec l'enfant c'est la même chose, fondamentalement elle n'en veut pas, ce qu'elle veut c'est surtout que l'autre ne l'ait pas.

6 - La sagesse de Salomon.


  • 1 Rois 3.28 : Tout Israël apprit le jugement que le roi avait prononcé. Et l'on craignit le roi, car on vit que la sagesse de Dieu était en lui pour le diriger dans ses jugements.

On croit souvent à tort que Salomon a demandé la sagesse, mais le verset contenant sa demande nous dit : Accorde donc à ton serviteur un coeur intelligent (Shama) pour juger ton peuple, pour discerner (biyn) le bien du mal! (1 Rois 3.9). Le mot intelligence est 'shama', et il signifie autant 'écouter' et 'entendre' que 'comprendre'. Par contre, le don de Dieu n'est pas exactement le même :

  • 1 Rois 3.12 : voici, j'agirai selon ta parole. Je te donnerai un coeur sage (Chakam) et intelligent (biyn), de telle sorte qu'il n'y aura eu personne avant toi et qu'on ne verra jamais personne de semblable à toi.

Salomon demande Shama + Biyn et obtient Chakam + Biyn. Ce don de Dieu a pour but que personne ne puisse plus jamais posséder une sagesse d'un tel niveau. La différence entre la demande et ce que Salomon reçoit tient en deux choses, les limites de la compréhension humaine, et l'absence de limites de Dieu. Salomon a demandé à être capable d'analyser les situations, Dieu lui a donné la capacité de les ressentir. Salomon ne pouvait pas comprendre ce qui est plus grand que lui, son cœur le poussait à vouloir prendre soin du peuple de Dieu, alors il a demandé ce qu'il pensait nécessaire pour être un bon roi. Dieu de son côté, a entendu les mots de Salomon, mais a répondu à son coeur. Il aurait pu lui donner ce qu'il demandait de sa bouche, c'est-à-dire une capacité analytique poussée pour le bien du peuple, mais il a choisi d'écouter son cœur et lui a donné un discernement qui va au-delà de ce que le cerveau humain peut appréhender. Cette capacité de compréhension est divine, c'est pour cela que personne ne l'égalera jamais, parce que c'est un don et Dieu seul choisit à qui il les donne.

Il m'avait semblé étrange que le premier jugement de Salomon après avoir reçu la sagesse de Dieu concernait deux prostituées. Finalement, cela fait sens. Salomon, saisis par la sagesse de Dieu, ne regarde plus avec les yeux de la loi, mais avec ceux de la grâce. La Sagesse, selon le chapitre 8 du livre des Proverbes est le Fils de Dieu (dont Jésus est la partie terrestre révélée plus tard). Salomon l'ayant reçu ne pouvait pas juger selon la loi, et la profondeur de son jugement est telle qu'elle dépasse de très loin la faiblesse des mots qui nous l'ont transmis à travers les millénaires.

Si cet enfant préfigure Jésus, les deux prostituées sont des images des ancêtres terrestres de Jésus. Pour l'une, celle de Tamar, qui se prostitua avec Juda pour obtenir par la ruse ce qu'elle estimait être en droit de recevoir selon la loi. Pour l'autre, celle de Rahab, qui abandonna tout pour s'attacher à Dieu et devint la mère de Boaz, futur mari de Ruth, obtenant par la même une descendance qu'elle n'aurait jamais eue si elle n'avait pas renoncé à tout.